Armée de Sauvegarde de l'Humanité
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 Black Water (parce que en anglais c'est classe)

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MessageSujet: Black Water (parce que en anglais c'est classe)   Black Water (parce que en anglais c'est classe) EmptyDim 7 Sep - 14:24

Oh ho ho ! Ceci est la version littéraire du scénario que j'avais écrit pour un devoir l'année dernière. Et accessoirement pour la bédé de maelle.
J'aimerais bien savoir ce que vous en pensez car l'univers me plaisait bien et j'envisageait d'écrire des séquelles, genre ce qui as pu arriver à Ax et Pok avant, pour développer un peu plus les perso et le monde dans lequel ils vivent. Youpi !



Black Water

Les immeubles s’étendaient à perte de vue. D’en bas, on ne pouvait même pas voir le ciel -d’en bas, on ne voyait pas grand chose de toute façon. Ils s’élançaient très haut, comme s’ils s'efforçaient d’atteindre quelque chose hors de leur portée. C’était impossible qu’ils aient été construit de main humaine. Tout bien considéré, il n’y avait plus personne pour les ériger, ni plus personne pour les habiter. Ils avaient perdu leur utilité, mais ils continuaient d’exister, pour des fantômes.

Et il y avait toute cette eau. Une eau noire, étrangement chaude, qui s’écoulait partout. Elle glissait dans les rues, tombait en cascade des fenêtre béantes, s’insinuait dans les fissures du béton, engloutissait tout. Et personne ne savait d’où elle provenait. On ne se souvenait même pas de son apparition. C’est comme si elle avait toujours été là, du plus loin que l’on s’en souvienne.

Et dans ces rues vides, le vent et l’eau était les seuls sons que l’on entendait. Ça, et le ronronnement ininterrompu des machines.

Ax et Pok, eux, progressaient comme ils pouvaient. Ils pataugeaient dans une ruelle étroite, Ax ouvrant la marche, Pok le suivant scrupuleusement, pensant sans doute que ça lui éviterait de trébucher pour la troisième fois consécutive. Ils ne parlaient pas.

Malgré toute ces précautions, Pok fini par se prendre les pieds dans un obstacle invisible et disparu dans un bruit d’éclaboussure. Ax ne s’arrêta pas, jetant juste un rapide coup d’œil vers les ondes s’élargissant sur l’eau. Pok était un véritable boulet. Il ne comprenait pas comment il faisait pour trébucher sur quelque chose qui n’existait pas. Il devait être le seul être au monde ayant besoin de marcher en regardant ses pieds pour ne pas qu’ils s’emmêlent.

Au bout d’un court moment, Pok refit surface au même endroit, envoyant des éclaboussures partout, trempé et haletant. Il pataugea vers Ax avec une discrétion infinie, remontant sur le bas de son visage le demi masque en tissu qui avait glissé et secouant ses cheveux pour les débarrasser de leur surplus d’humidité.

-J’en ai marre ! Quand est-ce qu’on s’arrête ? C’est la troisième fois que je trébuche sur je ne sais quoi, et toi, tu pourrais un peu compatir !

Ax se força à répondre, sans s’arrêter ni lui jeter un seul regard, l’air toujours aussi absent.

-Personne ne t’as obligé à me suivre.
-Certes. Mais avoue que tu te sentirais seul, sans moi.
-Avoue que toi, tu te sentirai seul sans moi.

Pok eu une moue contrariée et garda le silence un instant. Puis il accéléra un peu le pas, rejoignant Ax à sa hauteur.

-Quelle mauvaise foi.

Sa remarque fut largement ignorée et Pok eu la soudaine impression d’être devenu invisible, ce qui le fit se sentir obligé de faire un maximum de bruit en pataugeant dans l’eau, pour se prouver que ce n’était pas encore le cas.

Il s’avéra que Ax ne s’était pas trompé de route, et quelques heures plus tard, ils avançaient toujours, mais cette fois sur une passerelle grillagée s'étendant au dessus de l’eau, fixée sur le côté d’un immeuble décrépit. Ax s’arrêtait de temps en temps pour regarder le paysage, qui pourtant offrait toujours le même tableau -l’eau et les immeubles, indéfiniment. Juste après lui, Pok s’arrêtait exactement aux mêmes endroit et regardait exactement la même chose, l’air intéressé.

Au bout de plusieurs minutes de ce manège, il fini par laisser tomber et rattrapa Ax qui progressait toujours aussi silencieusement.

-Où est ce que l’on va en fin de compte ? C’est partout pareil, et on a croisé personne depuis des lustres.
-Tu n’as rien remarqué ?

Pok se tut et regarda autour de lui, comme s’il avait raté quelque chose d’évident. Mais le paysage n’avait pas changé, et il ramena son regard sur son compagnon.

-On entend plus le vent ?
-Non. Enfin oui, mais ce n’est pas ça. On monte. On ne fait que monter depuis le début. Et le courant est de plus en plus rapide.
-Et ?

Ax eu l’air vaguement désespéré, ce qui chez lui signifiait beaucoup, et Pok lui renvoya un regard emplit d’innocence, sensé le remettre dans de bonnes dispositions.

-Je pense que ça veut dire qu’on approche de sa source.
-La source ? De toute cette eau ? Parce que tu crois qu’elle en a une ? A mon avis, elle est juste “là”.
-Peut être, mais ce n’est pas normal. Il n’a jamais plu. De plus loin que je me souvienne, il n’y a même jamais eu de nuages, dans le ciel. L’eau doit bien venir de quelque part.
-C’est peut être une punition divine ? Le déluge et tout ça.
-Le déluge ?

Pour une fois, ce fut Ax qui fixa Pok sans comprendre.

-Ben, le bon Dieu et tout. Le déluge. Tout ça quoi. T’en a jamais entendu parler ?

Ax secoua négativement la tête et se remit à fixer l’eau, comme si ce que racontait Pok n’avait plus d'intérêt. Ce qui n’empêcha pas celui-ci de continuer sur sa lancée.

-C’était quand j’étais au 151eme. Il y a une bande d’allumés, je crois que c’est eux qui vivent le plus près du sol. Ils ont un genre de livre, je ne sais pas si tu vois ce que c’est, un truc avec des choses écrites dedans, sur un genre de tissu, mais pas vraiment, ça se déchire comme un rien.
Enfin bref, c’est eux qui m’ont parlé de ça quand je leur suis tombé dessus. Ils ont une sorte de chef avec une calvitie qui sait ce qu’il y a marqué dans le livre, et dedans, c’est marqué que l’eau, c’est une punition de Dieu. Et Dieu, c’est un genre de grand bonhomme barbu qui vit dans le ciel et qui dirige tout, et il a eu un tas d’ennuis avec son fils. C’est assez épique.

Pok fit une pause pour rajuster les lunettes de soudeur qui lui servait à maintenir ses cheveux en arrière, semblant réfléchir. C’était aussi une pause hautement dramatique sensée susciter chez Ax une réaction mais n’en obtenant aucune, il reprit la parole.

-Mais bon, tu y crois, toi ? Un mec dans le ciel ? Sur quoi il tient ? Il fait de la lévitation ? Depuis le temps, ça se saurait. Enfin, de toute façon, ils ne voient même pas le ciel, de là où ils sont. Ils doivent s’imaginer que c’est un genre d’étage inaccessible au commun des mortels. Mais bref, leurs idées commencent à se répandre, et même dans les étages supérieurs tu trouves des gens pour en parler. C’est pour ça que tu aurais pu connaître, comme tu voyage pas mal. Même si en général, ils finissent toujours par se faire balancer à la flotte, parce qu’il sont un peu énervants, avec leurs histoires. Tu comprend.
-Pourquoi tu n’es pas resté à leur étage ?

Si sarcasme il y avait, Pok ne le saisit pas et poursuivit avec enthousiasme.

-Ben, ils ont commencé à me dire que je devais me dissoudre. Et ça m’avait l’air un peu barbare comme idée, alors je suis parti. Apparemment, ils veulent dissoudre un tas de monde, pour que l’eau parte. C’est pour ça qu’on les évite.
-Hm... Tu es sur que c’est le bon mot ?

Ax avait reprit sa marche, s’éloignant ostensiblement de Pok, qui se décolla de sa façade pour le rattraper. Ils finirent par arriver au bout de la passerelle. Elle ne se poursuivait pas sur le côté de l’immeuble, et s’ouvrait sur un profond fossé où se déversait l’eau en cascade. A l’origine, elle devait sans doute passer par-dessus, puisque qu’elle reprenait sur l’immeuble d’en face. Mais le fossé séparant les deux moitiés était trop espacé pour pouvoir le franchir d’un bond.

-Uh, on fait quoi, maintenant ?

Ax regarda autour de lui, puis avisa une ouverture dans l’immeuble, juste au dessus d’eux. Il la désigna à Pok, qui grimpa en s’aidant de renfoncements dans la façade. L’ouverture se poursuivait en un couloir sombre, bas de plafond et couvert de poussière. De petites ouvertures près du sol diffusait une lumière grisâtre, ne faisant qu’accentuer l’aspect assez glauque de l’endroit.

Pok observa le couloir d’un air circonspect et eu la subite envie de faire demi-tour, mais Ax avait déjà grimpé à son côté sans qu’il ne le remarque, et il tenta de déguiser son sursaut en un mouvement tout à fait naturel. Même si de toute façon, Ax n’avait pas fait attention à lui.

Du bout du couloir leur provenait comme un ronronnement de moteur, et Ax s’y engagea. Pok le laissa avancer tout seul, l’air dubitatif, mais comme rien ne venait le dévorer, il se résigna à le suivre.

Le couloir s’arrêtait devant une petite porte branlante, qu’Ax ouvrit pour disparaître dans la pièce attenante. Pok se retourna, considéra le fond du couloir dont on ne distinguait même plus l’ouverture, et passa la porte avec un soupir. Il lui arrivait quand même de regretter les membres de l’Eglise du renouveau déontologique, comme ils s’appelaient, quelquefois. Au moins, on rigolait bien avec eux. Même si c’était surtout à leur dépends.

La pièce où ils étaient entré était assez vaste et haute de plafond, contrairement au couloir qu’ils avaient traversé pour y parvenir. Mais tout cet espace était remplit d’appareils électroniques assez imposants qu’Ax et Pok ne reconnaissaient pas. Ils étaient tous en mauvais état et couvert de poussière.

Sur le mur de droite, une grande fenêtre ouvrait sur l’extérieur, et c’était la seule source de lumière. Pok identifia la grosse turbine contre le mur en face de lui comme l’origine du bourdonnement constant qu’ils entendaient, et tandis qu’Ax cherchait une éventuelle sortie, il fit le tour de la pièce, tripotant chacun des appareils en essayant de déterminer leur utilité. Puis, un pied crasseux dépassant de derrière une énorme unité centrale attira son attention, et il appela Ax d’une petite voix sans quitter l’objet des yeux.

A eux deux, il déplacèrent l’appareil, et découvrirent une jeune fille adossée contre le mur. Elle portait une robe qui avait du être blanche dans des temps reculées, et ses jambes nues étaient étendues devant elle. Elle les fixaient de ses yeux caves, profondément enfoncés dans les orbites de son visage maigre.

-On dirait un cadavre....

Ax s’accroupit et tendit la main pour la toucher, mais elle avança brusquement le visage vers lui, comme pour le mordre. Il se recula précipitamment, tombant assit dans la poussière. Pok s’était déjà éloigné.

-Bah, c’est une technophile, on ferait mieux de la laisser tranquille.

Ax détacha lentement ses yeux de la fillette et se tourna vers Pok, réclamant une explication dont il se fendit à contre-cœur.

-C’est juste moi qui les appelle comme ça. A la base, c’est des humains comme nous, mais ils ont trouvé un moyen de brancher leur système nerveux sur des machines, par un terminal où je ne sais quoi. Me demande pas pourquoi ils ont voulu faire ça. Ils passent leur temps comme ça, reliés à des machines. Le truc, c’est qu’ils restent amorphes à longueur de journées, comme elle, et au bout d’un moment...

Ax s’était retourné vers la fillette, qui maintenant regardait dans le vide, l’air absent, comme s’ils n’existaient plus. Pok la considérait avec un mélange de mépris et de dégoût, tout en poursuivant son histoire.

-Ils devraient tous mourir en quelques jours, mais les machines les maintiennent en vie, parce que si eux ils meurent, elles meurent aussi, vu qu’elles utilisent leur énergie. Même si je vois pas trop où elles trouvent de l’énergie là-dedans. Alors ça donne ça. Des genres de fantômes. Il y en a pas mal dans les étages inférieurs.

Il ramassa un fil de fer tordu par terre et s’en servit pour piquer la jambe de la gamine, mais elle ne réagit pas. Tout juste si elle cilla.

-Tss....

Ax s’était relevé et avait reprit son exploration de la pièce sans y prêter plus attention. Il finit par s’arrêter devant un amas compliqué de fils et de morceaux de métal d’où émergeait un écran avec un clavier grossier. Des lettres s’y affichaient sans arrêt, reproduisant le même mot à l’infini. Il fixa le message un moment, interdit, puis il appela Pok doucement.

-”Aidez-moi” ? C’est elle qui écrit ça ?

Ax se tourna vers la fillette, toujours adossée à son mur, immobile. Puis il retourna s’accroupir près d’elle. Pok gardait les yeux fixés sur l’écran, hypnotisé par les lettres lumineuses.

-Un terminal....

Il bascula doucement la tête de la fillette vers lui et découvrit à la base de sa nuque, sur le côté, de nombreux câbles s’enfonçant directement dans sa chair. Il grimaça légèrement et les saisit dans sa main. Pok lui signala que les lettres avaient cessés d'apparaître.

Ax acquiesça, et tira violemment sur les câbles qui s’arrachèrent à la jeune fille. Tout se mit soudain à grésiller, puis la turbine s’éteignit et ce fut le silence. La fillette n'eut même pas un soubresaut. S’étant attendu à quelque chose de plus violent, Ax la reposa doucement contre le mur, soulagé sans en avoir l’air.

-Ax, viens voir.

Ax se releva et rejoignit Pok près du moniteur. On n’y lisait plus le message de la gamine, mais une suite de lettres et de chiffres sans signification, puis plusieurs “non”, et enfin, “c’est de votre faute”.

-De quoi, c’est de notre faute ?

Pendant que Pok essayait d’écrire quelque chose avec le clavier, Ax fit du regard le tour de la pièce. Les machines, le corps de la fillette, et enfin, l’eau par delà la fenêtre. C’est de notre faute ?

Une odeur de brûlé le ramena à la réalité, et il reporta son attention sur Pok qui suçait son doigt en lançant au moniteur des regards haineux. L’écran était éteint et le clavier grésillait, une gerbe d’étincelles jaillissant de temps à autres de l’amas de câbles qui l’entourait.

-Saloperie !

Pok abandonna l’écran en boudant et se dirigea vers la fenêtre au fond de la pièce. Il l’ouvrit et s’y pencha, la moitié de son corps par dessus la rambarde.

-On peut passer par là, il y a une passerelle qui traverse jusqu’à l’autre côté.

Ax était resté immobile, à contempler l’écran noir en silence, comme s’il réfléchissait à quelque chose.

-Ax ? Tu viens ?
-Ah, oui.
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MessageSujet: Re: Black Water (parce que en anglais c'est classe)   Black Water (parce que en anglais c'est classe) EmptyDim 7 Sep - 14:25

Ils s’étaient assit sur le palier d’un immeuble, les pieds dans l’eau et les chaussures sagement rangées à leur côté. Ax regardait pensivement le liquide d’un noir profond, se demandant si le bruit qu’il entendait provenait vraiment d’une cascade. Pok, qui jusque là mangeait ce qu’il pensait être une barre de survie, finit par s’étirer en baillant et s’allongea sur le dos, posant ses yeux sur le ciel qu’il distinguait maintenant bien mieux.

-Dis, Ax, c’est encore loin ? Depuis des jours on a fait que monter des tas d’escaliers, il fait de plus en plus froid et le courant est devenu vraiment rapide.
-Mh.

Pok se redressa, pas tellement satisfait de la réponse, et fixa le profil de son compagnon l’air dubitatif.

-Uh, dis, t’es bizarre depuis qu’on a achevée la technophile. Qu’est ce qu’il y a ?
-Rien. Mais... L’ordinateur, il disait que c’était de notre faute. C’est peut être vraiment une punition divine.
-La flotte ?
-Oui. Ça n’a pas tout le temps été comme ça. Je veux dire, ces immeubles partout, des gens branchés à des ordinateurs, et l’eau noire. On a bien du faire quelque chose de mal. J’ai vu des dessins. Il y avait des choses vertes, et des choses comme des humains mais pas vraiment. Et on était beaucoup plus nombreux. Il y avait de l’eau aussi, mais bleue. Il a du se passer quelque chose.

Pok soupira et ramena ses pieds à la surface. Il entreprit de les sécher approximativement avec un bout de son pantalon et attrapa ses chaussures.

-Bah, on verra bien quand on y sera. On approche, non ? Et puis, de toute façon, si l’ordinateur à raison, il a bien dit que c’était trop tard. Alors ça sert à rien de te morfondre maintenant.
-Mh...

Ax n’était que très moyennement convaincu. Malgré tout, il remit ses chaussures sans prendre le temps de se sécher, et ils repartirent, au grand dam de Pok qui aurait de loin préféré rester là et dormir. Longtemps.

Ils étaient arrivés devant une immense cascade, comme il n’en avait encore jamais vu. Le plus étrange, c’est qu’elle se déversait n’ont pas d’un immeuble, comme c’était le cas habituellement, mais d’une grotte à l’ouverture étirée toute en longueur. Ses contours étaient lisses et nets, légèrement rosés. Rien qui ne semblait artificiel. Même le sol, plat et uni, ne ressemblait au rien au béton accidenté qu’ils parcouraient d’ordinaire.

Le chemin se poursuivait abruptement le long de la cascade, et semblait s’enfoncer dans la grotte en longeant le lit de la rivière. Ax et Pok le suivirent en silence, légèrement méfiants.

Devant la grotte, ils s’arrêtèrent. Pok la considérait d’un œil circonspect, n’osant pas s’avancer plus. Ax, accroupit à ses pieds, détaillait les parois et tripotait la pierre l’air préoccupé, ce qui finalement poussa Pok à faire de même.

A peine avait-il posé sa main contre la paroi qu’il la retira, la fixant comme si elle ne lui appartenait pas.

-Ax...
-Oui. C’est bizarre, hein ?
-C’est chaud.
-Et spongieux.
-C’est pas normal.
-Ce n’est pas de la roche.
-Eew.

Ax se releva, et fixant droit devant lui l’air décidé, il s’engouffra dans la grotte. Pok hésita avant de le suivre, mais finalement il lui répugnait plus de rester planté tout seul sur un genre de mollusque.

Il faisait très sombre à l’intérieur, ce qui les forçaient à avancer en s’appuyant sur la paroi, ce qui n’était pas très agréable.

-Ça pu. Ça sent le renfermé et l’haleine fétide.

Ax ne pouvait pas dire le contraire, mais il ignora la remarque et continua d’avancer en silence, avant de s’arrêter brusquement. Pok s’emplafonna violemment dans son dos et tout deux rentrèrent dans la paroi qui se dressait comme un mur devant eux.

-Ah, qu’est ce qui te prend ?
-Le chemin s’arrête ici, on ne peut pas aller plus loin.

Ax se décolla de la paroi en se tenant le front. Pok attendit sagement une remarque, mais rien ne vint. Ax semblait être en pleine réflexion, puis il retourna se coller sur la paroi.

-Euh...
-Chut.

Pok attendit la fin de son manège en s’asseyant par terre.

-Ça pulse.
-Uh ?
-Les murs, on dirait qu’ils pulsent.
-Ah.

Ax s’assit près de lui. Il réfléchissait. Ici, le courant s’était ralenti, et semblait émerger des profondeurs de la grotte.

-C’est tout alors ? Ça ne mène nulle part ? On a fait tout ça pour rien ?

Ax se releva d’un bond, enleva la sacoche qu’il portait à sa ceinture et la tendit à Pok qui la prit sans comprendre.

-Je vais aller voir.
-Dans l’eau ?
-Oui. On dirait que le courant vient du font. Il doit y avoir un tunnel ou quelque chose.

Pok le fixa d’un air dubitatif.

-C’est du suicide.
-Le courant n’est pas très rapide, ici.
-Tu trouve ?

Ax haussa les épaules et s’approcha du bord, sans même enlever ses chaussures.

-Si tu remonte pas, compte pas sur moi pour aller te chercher.
-J'allais pas te le demander.

Ax sauta. Et Pok se mit à attendre, tripotant nerveusement la sacoche presque vide.

Au bout d’un moment, lorsque Pok commençait à se résigner à l’idée de faire son deuil, la surface de l’eau se rida et Ax émergea, prenant une grande inspiration. Il nagea tant bien que mal jusqu’au bord et Pok l’aida à se hisser sur la berge.

-Alors ?

Ax tenta vaguement de reprendre son souffle avant de répondre, affalé sur le sol.

-L’eau est noire, j’ai rien vu.
-Vraiment ? C’est étonnant.

Ax lui lança un regard noir auquel Pok répondit par un rictus.

-En tâtonnant, j’ai sentis quelque chose. Il y a comme une grande brèche. Mais c’est pas possible d’y entrer. Elle est pas assez large, et c’est trop dur, le courant repousse. Mais de toute façon, je crois que ça ne mène nulle part. C’est comme une grande plaie dans le sol. Et l’eau vient de là. Mais il doit y avoir d’autre endroits comme celui-là un peu partout.

Ax fixait l’eau tout en parlant. Il se parlait plus à lui-même qu’à Pok, comme si le fait de faire un compte-rendu de ce qu’il avait senti lui permettait de faire le lien entre les différents hypothèses qu’il avait échafaudé jusqu’alors quant à l’origine de l’eau.

-Les bords sont bizarres. Il sont chauds comme le reste, mais ils collent, enfin, c’est une drôle d’impression. Et l’eau, je crois qu’elle provient de l’intérieur de la roche. Comme si elle suintait.
-Eew, ben, ça suinte ici aussi.

Pendant qu’il parlait, Pok s’était mit à dessiner des formes sur le sol avec un petit couteau sorti de la sacoche d’Ax. Des formes qu’il avait tracées sortait une eau épaisse et noire. Pok la considérait l’air vaguement dégoûté.

Ax sembla réfléchir, puis il lui arracha le couteau des mains et le planta de toute ses forces dans le sol. De l’eau en jaillit immédiatement, et Pok se recula par réflexe.

-Qu’est ce qui te prend ?
-C’est bizarre, non ?
-Certes. Enfin, la roche peut être constituée d’eau.
-Tu crois vraiment à ce que tu dis ? Elle a mis du temps à sortir quand tu ne grattais qu’en surface. Comme quand tu te fais une éraflure. Ça ne saigne pas tout de suite.
-T'es en train de me dire que cette eau est comme du sang ?
-Plus ou moins. Elle en a même le goût métallique, en tout cas. C’est pour ça qu’on la filtre avant de la boire.

Ax et Pok se regardèrent en silence. La même idée venait de les frapper tout les deux. Pok retira prudemment le couteau du sol, et l’eau s’écoula en petite rigoles éparses. Il ramena lentement ses jambes sous son menton et posa sa tête dessus.

-Donc... la genre de brèche au fond, ce serait vraiment une plaie... et la roche est chaude et molle parce qu’elle est vraiment vivante... Ou un truc comme ça.

Ax approuva en silence.

-Et si on en croit ce qu’a dit l’ordinateur, les responsables de tout ça, se serait nous. Enfin, les nous d’avant nous. Je sais pas ce qu’on a fait. Trop d’immeubles ? Mais en tout cas, il est trop tard. Parce que... parce que la chose sur laquelle on vit, c’est un genre de carcasse agonisante qui se vide de son sang. J'ai raison ?

Ax se releva brusquement, ramassant sa sacoche près de Pok, qui étira ses jambes devant lui en soupirant.

-C’est joyeux, tout ça. Qu’est ce qu’on fait, maintenant ?
-Je ne sais pas. Rien. Tu as lu comme moi, c’est trop tard. Je n’ai pas de recette magique pour guérir une planète organique de plusieurs milliers de kilomètres de circonférence. On ne sait même pas exactement ce qui s’est passé. Même si c’est facile à deviner.
-Alors on ne fait rien.
-Qu’est ce que tu veux qu’on fasse ? De toute façon, plus personne ne fabrique rien depuis longtemps. On se partage entre des technophiles, des fanatiques religieux, et des gens comme nous qui essaient de survivre comme ils le peuvent. Les immeubles et les machines sont bien plus nombreux que nous. Il y en a tellement qu’on aperçoit à peine le ciel.

Pok se releva en s’époussetant les genoux, et suivit Ax qui se dirigeait déjà vers la sortie.

-Alors on la laisse mourir ?

Ax haussa les épaules.

-Bah, c’est ce qu’on fait depuis toujours. Même si on faisait quelque chose maintenant, ça ne ferait pas de différence. Tu as vraiment l’impression d'être sur une planète vivante ?

Pok hésita un instant, et jeta un coup d’œil à la paroi qu’il longeait comme pour s’excuser d’avance.

-Non, pas vraiment.

Et ils sortirent à l’air libre.

Il y avait toujours ces immeubles qui s’étendaient à perte de vue. D’en bas, on ne pouvait toujours pas voir le ciel. Même s’il n’y avait plus personne pour les ériger, ni plus personne pour les habiter, et même s’ils avaient perdu leur utilité, il continuaient d’exister, pour des fantômes.


THE END OH YEAH
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